lundi 3 septembre 2012

LECTURE : De la servitude moderne de Jean-François Brient


Il s'agit à la fois d'une vidéo de 52 minutes et d'un texte écrit par Jean-François Brient en 2007 diffusé librement sur Internet (lecture sur le site http://delaservitudemoderne.org ou téléchargement en pdf). Le documentaire vidéo est une lecture du livre De la servitude moderne, accompagnée d'images détournées, essentiellement extraites de films. Il a été amusant par la suite de retrouver l'un de ces films dans son contexte original : Invasion Los Angeles, un navet dont la seule scène intéressante hormis la fin comique est celle présentée dans le documentaire De la servitude moderne.
« L’objectif central de ce film est de mettre à jour la condition de l’esclave moderne dans le cadre du système totalitaire marchand et de rendre visible les formes de mystification qui occultent cette condition servile. Il a été fait dans le seul but d’attaquer frontalement l’organisation dominante du monde. »


Il y a quelques mois, je lisais un roman, il y était question d'anarchisme, dans une acception que je ne comprenais pas. Stupidement, j'en étais resté à cette définition truquée de l'anarchisme comme chaos, j'ai donc entrepris de me documenter : la lecture de L'ordre moins le pouvoir deNormand Baillargeon en témoigne. Je poursuis actuellement avec l'épaisse anthologie de Daniel Guérin, Ni Dieu ni maître. Mais auparavant, j'avais tout simplement lu ce qu'en disait Wikipédia. Un article long, rempli de références diverses à ne plus savoir où aller et que lire... Sauf, en fin d'article, un lien vers ce texte, De la servitude moderne, que j'ai donc lu en tout premier lieu. 
Si je n'ai pas évoqué cette lecture précédemment, c'est parce qu'il a fallu la digérer, lire autre chose qui me permette de rétablir un équilibre. Comment peut-on vivre lorsque l'on écrit un tel texte ? me suis-je alors demandé. De la servitude moderne m'a rendu malade. Mais c'est un texte que je garderai à l'esprit et vers lequel je compte retourner, parce que sa concision et sa précision ressemblent à la sonnerie d'un réveil : De la servitude moderne me sort de la torpeur.
« Quant à ceux qui trouveront à redire sur cette œuvre en tant qu’elle ne serait pas assez révolutionnaire ou bien trop radicale ou encore pessimiste n’ont qu’à proposer leur propre vision du monde dans lequel nous vivons. » 
Pessimiste, cette œuvre l'est à un point tel qu'il m'a semblé après sa première lecture qu'il ne nous reste plus qu'à nous jeter par la fenêtre. « Le pouvoir n'est pas à conquérir, il est à détruire », selon la formule utilisée en fin de livre, mais ma lecture était tellement démoralisante que c'était plutôt vers une destruction personnelle qu'elle menait.

Les chapitres égrènent tous les aspects de la vie où nous sommes esclaves. C'est une longue énumération, puisque tout nous asservit. Des phrases courtes comme des sentences. Certains thèmes ont eu une résonance particulière pour moi : l'habitat (au vu de la dégradation des lieux, de l'urbanisation à outrance près de chez moi qui me répugne) l'alimentation, le travail, la consommation et surconsommation. Et la « démocratie », le vote comme illusion de choix : 
« [Le pouvoir] est tyrannique par nature, qu’il soit exercé par un roi, un dictateur ou un président élu. La seule différence dans le cas de la « démocratie » parlementaire, c’est que les esclaves ont l’illusion de choisir eux-mêmes le maitre qu’ils devront servir. Le vote a fait d’eux les complices de la tyrannie qui les opprime. Ils ne sont pas esclaves parce qu’il existe des maîtres mais il existe des maîtres parce qu’ils ont choisi de demeurer esclaves. » 
J'ai lu ce texte juste avant les élections présidentielles. J'avais en tête l'idée du vote comme droit, mieux (ou pire) même, comme devoir !, De la servitude moderne m'a perturbé au moment de placer un bulletin dans l'urne, c'est le moins que je puisse dire.

En somme, c'est un livre très pessimiste, car l'accumulation n'est contrebalancée que par un maigre chapitre (le XIXe, intitulé « perspectives »), seule petite lumière au fond du tunnel dont je cite l'élément essentiel : 
« L’autogestion dans les entreprises et la démocratie directe à l’échelle des communes constituent les bases de cette nouvelle organisation qui doit être antihiérarchique dans la forme comme dans le contenu. » 
Une phrase pour répondre à tout ce qui précède, c'est peu. Mais c'est aussi un livre-déclencheur. Après l'avoir lu, on ne peut je pense pas rester le même. Et d'autres lectures sont là pour élargir le tunnel.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Votre réaction ?